[par Archie Mew aka le Grand Archimol]
Ils nous font chier avec leurs récits en préfa : à nous abreuver de tribunes & gradins où les mots-clés se poussent toi de là que je m'y mette, sans compter les interminables voyages d'agrément & plénières aussi sinistres que des conventions de rôlistes. L'imagination réduite au rang de boîte à outils, avec ses tweets échographiques, la sous-ironie et l'amour-gloire dans le fion de la République (ou autre). Gredins ! Récitateurs ! Petites phrases sur le déclin de la France-mes-deux : on les entend tirer la sonnette d'alarme dans leur palais des glaces, comme s'ils avaient le cul propre, mais la horse qu'ils dealent est coupée aux on-dit et au vernis à ongles. Commentateurs ! Moules à pleutres ! Ils nous font chier avec leur manie de raconter des histoires du jour, les pieds au chaud dans leurs écrase-merde, chargés qu'ils sont de l'obligation de donner de l'importance aux prophéties des admoniteurs encastrés dans une lucarne. Il y a aussi l'obsession pour l'articulation et le tralala typomane dont raffole l'air du temps, juste après le hors d'œuvre. Angle d'attaque, développement de la séquence et peines de cœur : l'histoire réduite à une râpe à fromage. Romans pour archiduchesses séniles (ou marquises) et barons en laque, racontars assemblés en chats pitres (ou page turners) pour qu'on suive mieux : la littérature miniaturisée et cet irrésistible besoin de publier ses "travaux", ou travers de veaux. Chacun y va de son couplet sport. Reportages sur des peuplades qui n'ont rien demandé à personne et qu'on fait chier pour qu'elles agitent leurs colifichets sous le nez des caméras. Miauleries. Bonne conscience et apôtres bien habillés qui disent "il était une fois" d'une main, tout en expulsant de l'autre le clochard en bas de l'immeuble, à cause qui dérange le syndic, pareil pour les tox. Ils nous font chier avec leurs jités et leurs sujets, entrée-plat-dessert, alors qu'on ne rêve que d'hommes sabbatiques et de repas pris dans le désordre. Un festin sans queue ni tête mais dont on pressent qu'il nous arrosera de cette simultanéité avec laquelle les passiflores crient et poussent, comme des bébés. Ils nous font chier avec leurs murets bâtis à la hâte entre les mots, alors qu'il suffit d'enlever une seule brique à leurs dissertations pour voir défaillir tous ces systèmes d'épopées bavardes : au petit matin, après une partie de Tétris nocturne qui les a vu avaler leurs chapons, jaillit l'archimur. Par pure bravade. Par jeu. Parce qu'il vaudrait mieux préférer ne pas. Par désirmou de ne plus écouter leurs brochettes. Derrière l'archimur le bruit de leurs livres, journaux, papas, conservations, ne parvient pas. En lieu et place de leurs décors, on se posera dans un square en friche, entouré de vieux murs chaulés, pour y observer lentement les nervures des ailes d'un coléoptère ou écouter la fanfare que forment les grillons pris sous les gouttes de rosée, alors que frémit l'eau derrière la chantepleure. Une fenêtre pourra aussi faire l'affaire, qui laissera apparaître le chiffre 22, comme l'écrivait le poète Péret emprisonné, après avoir longuement examiné un point de sa cellule : "Dans la dernière vitre je lus le chiffre 22 et aussitôt je sus que je serais libéré le 22." On pense aussi au Napolitain, dans Marelle, "qui resta des années assis au seuil de sa maison à regarder une vis par terre." Allons lire ça : "Le Napolitain était peut-être un imbécile, mais il eût peu aussi bien être l'inventeur d'un monde. Une vis puis un œil, un œil puis une étoile... Pourquoi s'en tenir à la Grande Habitude ?" Contre leurs chroniques, qui cherchent à nous saisir, faire de nos vies un point émouvant. | |