Archimou
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L'arbre-buste

3/29/2015

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[par le grand baObab]
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Demandez à la vie si elle est conditionnelle.

Il serait une fois ma vie. J'habiterais dans une forêt. Je serais seul et j'aimerais un arbre. Je vivrais avec lui ; je dormirais dans sa ramure. Je naviguerais dans l'épaisse étendue végétale porté par ses branches, ou à cheval sur sa cime.

Mais un jour, je m'ennuierais. On finit souvent par se lasser des amours à un sens. Alors je partirais. Je quitterais ma forêt pour découvrir d'autres horizons. Hélas, rien d'autre ne me plairait. Je chercherais à revenir mais on me retiendrait prisonnier. Je serais enfermé dans un laboratoire où l'on m'étudierait. On me poserait d'innombrables questions auxquelles je ne saurais pas répondre. Et puis je m’enfuirais.

Je parcourrais des kilomètres sans manger ni boire avant de m'effondrer sans force dans un fossé plein de rosée matinale. Je me réveillerais dans un lit ; une créature étrange et belle passerait un gant d'eau fraîche sur mon front pour faire baisser ma fièvre. Elle me sourirait. Je fermerais les yeux, heureux du tour pris par mon destin.

Bientôt, je serais sur pied et nous nous promènerions dans les bois jouxtant son jardin. Elle me tiendrait par le bras, me donnerait la main, me donnerait un baiser. Je penserais à mon arbre abandonné et, triste, m'en ouvrirais. Elle n'en serait pas froissée, déboutonnerait un à un les boutons de son chemisier et poserait ma tête tout contre son arbre-buste. J'aurais le nez gorgé du parfum de ses fleurs, mes cheveux pris dans les branchages, les oreilles chatouillées par la pointe de quelques feuilles ; et mes larmes de bonheur embelliraient sa verdure.
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    L'éditorial d'Archie Mew
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    Après les ballons de baudruche (n°1) et les masques (n°2) qui ont prouvé à petite échelle que le monde est un melon (mou, volant), on a cette fois décidé de grimper aux arbres, pour y construire une cabane. 

    Archimou, la revue qui change de forme comme de chemise (veau moulant).

    Le support choisi pour le 

    n°3 peuple les forêts et les mails de nos centres-villes : l'arbre, l'arbre, pour ses possibilités mutantes et ses ramifications & l'arbre-bras qui repousse quand on croit l'avoir scié, cousin de "l'archibras", cet appendice magique décrit par Fourier : "avec son appui un homme atteint une branche de 12 pieds de hauteur, saute sur l'arbre et descend de même, va pincer des fruits à l'extrémité de l'arbre et les rassemble dans le panier noué à l'archimain."

    On n'oublie pas l'arbre-barbe, cette forêt de poils où des oiseaux crasseux font leur nid & l'arbre-bar, où l'on réécrit sa vie au milieu d'inconnus stupéfiés. Le bistrot va fermer, mais personne ne veut sortir. Poèmes en bois, histoires tirées par les cheveux.

    L'arbre est un poing rempli de veines, et chaque invité de ce n°3 y a greffé une radicelle, s'amusant à écrire sur un tronc, plantant un arbre à coussins, tétant un buste ou faisant éclater un bouton d'herpès. On fit feu de tout bois dans l'Aisne, à Tokyo, dans la Drôme, à Montevideo ou à La Plata, en Bresse ou à Cordoue, etc. 

    Au registre généalogique, sériel et sérieux, qui mise tout sur la descendance, l'arbre préfère l'embranchement. Allons jeter un oeil chez Supervielle : "Chaque arbre est un archer qui lance des oiseaux" L'arbre en forme de lance-pierres, qu'on met en mouvement pour trouer la cible, les nuages et l'air. 

    Dans une des ses greguerias, petites phrases proches de l'aphorisme, le fieffé Gómez de la Serna, qui fricota avec paquet d'avant-gardes du 
    XXe s., décoche une belle flèche : "Changé en braise le charbon se souvient de tout, y compris de quand il était un arbre vert, dans un monde plein d'espoirs."  La possibilité commence en forêt ou le long d'un chemin de noyers. Ombres et saules. Ifs. Peupliers peuplés. Et que dire des hêtres.

    "Moi qui suis tout ce que je forme
    Je ne me savais pas feuillu."
    Comme Supervielle le pressentait, on abrite des êtres à feuilles.

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