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Mourir l'après-midi

8/20/2014

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[par gnoir, dans un jardin de Madrid, juillet 2014]

​Dans le fuglekongerige.
Je rêve et j'écris que je rêve que je crie : je rêve que je rêve que j'attente à ma vie avec une feuille de platane (office de masque) — j'enroule la feuille autour de fines lanières noires, elles me servent de mandibules, puis je serre, m'asphyxiant lentement, bulle, et je resserre pour en finir.
C'est la fin de l'après-midi à Madrid, place Dos de Mayo, le square est logé sous une lueur ocre, et je lis Le Cornet acoustique dans un fourré. A force d'immobilité, je confonds.
J'ai toujours vécu dans les parcs, à moitié caché, imitant les brindilles, les bourgeons, rêvant d'invisibilité, mais cette dévotion au décor je n'en peux plus : depuis mon arrivée dans le fuglekongerige, je me surprends à rêver de tire d'ailes et d'envolées, il faudrait sortir — la légende du phasme qui se prenait pour un oiseau qui lui même se prenait pour une feuille.
Je rêve que je m'efface avec une phrase légère comme l'air : « Son corps élancé était de proportions élégantes et, la tête mise à part, entièrement humain » C'est une citation volée. Je rêve d'oisellerie et de croisements.
Un groupe de jardiniers municipaux interrompt ma lecture. L'un d'eux arrose les agapanthes, il sifflote un vieux bolero, puis c'est une énorme tondeuse qui prend le relais et sème la panique dans le square, embrayage, frein de lame, décimant des milliers de congénères et copains.
Mon heaume est un phasme comme les autres : j'enfile ma tenue de camouflage — casque et plastron verts fougère, et genouillères brunâtres, tout le barda. 
D'habitude ce costume m'empêche d'être vu. Là, on m'a repéré.
Une attaque éclair, et voilà que mon petit théâtre s'effondre : un merle-de-mes-deux m'attrape par la tête, sorti d'on ne sait où, puis en moins de temps qu'il n'en faut pour dire "Je rêve et j'écris que je rêve que je crie et que je rêve que j'attente à ma vie", l'oiseau m'écorche. 
​Il m'observait probablement depuis plusieurs jours, lové dans un églantier noir ; je n'ai rien vu venir. Mes subterfuges sont éventés, et je rêve que je meurs d'avoir trop rêvé que je mourais — cet oiseau me débecte. Il m'éventre : je rêve que je crève.

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    L'éditorial d'Archie Mew
    Photo
    Le 27 août 2014,
    à Champ-Mol.

    Chers lecteurs,

    Pour le deuxième numéro d'Archimou, revue d'acte et d'expression, port du masque obligatoire !

    Après les ballons du n°1,
    les masques sont à l'honneur : tous les participants étaient invités à écrire, dessiner directement sur un masque
    ou bien à en créer
    un eux-mêmes.

    "Connais le heaume, adhère au phasme, sois le ravin du monde" écrivait à peu près Lao-Tseu.

    "Heaumes & phasmes"...


    Le phasme, comme la poésie, se trouve souvent sur une feuille, mais ce n'est pas une obligation. Il mime, itinère,
    se camoufle et danse (sans
    que l'on sache pourquoi) : bienvenue à l'école
    des phasmes.

    Quant au heaume, hum. Il est à ne porter, bien lustré, qu'en cas d'attaque saugrenue. Le cacher sous son oreiller, la nuit, au cas où un rôdeur.

    Mollement,

    Archie Mew,
    Grand-Archimol
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